Belgium 30558
Brevet d’importation
Le ministre de l’intérieur,
Vu la loi du 24 mai 1854;
Vu le procès-verbal dressé le quinze Mai 1872 à dix heures trente minutes
au Greffe du Gouvernement provincial de Brabant
et constatant le dépôt régulier fait par le Sieur J.J. Abadie et V. Leniau, à Schaerbeek
d’une demande de brevet d’importation
pour des perfectionnements apportés aux armes à feu, brevetés en France le 19 avril 1872
Arrête :
Article 1er,
Il est délivré aux Sieurs J.J. Abadie et V. Léniau, à Schaerbeek,
un brevet d’importation,
à prendre date le 15 Mai 1872 pour des perfectionnements apportés aux armes à feu.
Article 2eme,
Ce brevet lui est délivré sans examen préalable, à ses risques et périls, sans garanties soit de la réalité de la nouveauté ou du mérite de l’invention, soit de l’exactitude de la description et sans préjudice du droit des tiers.
Au présent arrêté demeurera joint le duplicata, certifié conforme par les Sieurs Abadie et Léniau de la description avec le dessin déposé à l’appui de la demande.
Bruxelles, le 31 Mai 1872,
Au nom du Ministre de l’Intérieur,
Le Secrétaire général
Le Directeur général délégué
–
Mémoire descriptif, déposé à l’appui de la demande d’un brevet d’invention(barred) de quinze ans pris en France, à la date du 19 avril 1871, pour perfectionnements apportés à la disposition et au fonctionnement des armes à feu par MM. Abadie et Léniau, demeurant à Paris, et élisant domicile à Bruxelles, rue du Progrès 110.
Exposé.
Les revolvers actuellement en usage, quel que soit d’ailleurs leur mode de construction, se divisent en deux systèmes distincts, quand à la manoeuvre : les uns s’arment avec le pouce et partent ensuite par la pression exercée par l’index sur la gâchette; les autres s’arment et partent avec l’index.
Ces deux systèmes ont chacun leurs avantages et leurs inconvénients.
Le premier, sans parler de la position anormale du pouce, lorsqu’il s’agit d’armer, position qui fatigue à la longue, nécessite deux mouvements; ce qui diminue la rapidité du tir, mais il offre l’avantage de viser.
Le tir avec le second système est beaucoup plus rapide; mais l’effort nécessaire pour armer le chien fait dévier l’arme et rend ainsi la justesse du tir d’une complète impossibilité.
Frappé des inconvénients inhérents à ces deux systèmes nous avons recherché les moyens et procédés de les faire disparaitre, tout en en conservant les avantages.
Le système de revolver pour lequel nous venons solliciter un brevet d’invention remplit entièrement le but que nous nous étions proposé : rapidité et justesse du tir.
Ajoutons que les moyens essentiellement nouveaux à l’aide desquels nous avons obtenu ce double résultat sont applicables à toutes les armes de guerre. (Fusils, carabines, mousquetons, etc.)
Pour donner une idée de la rapidité du tir que nous avons obtenue, nous dirons que le chargement et le déchargement peuvent aisément s’opérer cinq fois par minute : de telle sorte qu’avec un revolver de notre système, on peut dans le tir de précision, tirer 30 coups à la minute et 50 coups, dans le tir de vitesse.
Cela posé, passons à la description des divers organes dont se compose notre arme.
Description.
Fig.1. Vue longitudinale en élévation
Fig.2. Vue latérale.
Fig.3. Plan
Fig.4. Vue longitudinale en élévation avec coupe partielle de l’arme, montrant la position respective des pièces au moment ou elle est prête à partir.
Dans les 4 figures représentées au dessin ci-annexé, nous avons, pour l’intelligence de la description, représenté par la même lettre chacune des organes dont se compose notre système.
Afin de procéder d’une manière méthodique nous allons nous occuper tout d’abord du mécanisme composé des pièces A. B. C. D. E. F. G. H. I. J. K. L. M. Au moyen duquel s’effectue le chargement et le déchargement de l’arme.
A. est une pièce qui se confond entièrement avec le corps du revolver X et qui forme avec lui une charnière B. parallèle au canon, la tige C. servant d’axe à cette charnière.
À la partie supérieure de la pièce A est pratiquée une ouverture circulaire dans laquelle se meut à frottement doux et dans le sens rectiligne, soit en avant, soit en arrière une tige cylindrique D., sur laquelle tourne le barillet E et avec la pièce à rochet F.
C’est au moyen d’une sorte de verrou ou clef G dont l’axe porte à son extrémité terminée en carré, un levier H solidaire avec lui au moyen de la vis I et qui pénètre dans une ouverture rectangulaire J pratiquée à la tige D que le mouvement rectiligne rectiligne de celle-ci est obtenu.
L’arrêt L formant partie intégrante du canon auquel vient s’accrocher le verrou G ainsi que l’ouverture K dans laquelle pénètre l’extrémité de la tige D concourent simultanément à immobiliser cette dernière dans sa position rectiligne.
Examinons maintenant les pièces dont se compose la batterie.
Elles sont représentées (Fig.4.) dans leurs postions respectives, lorsque le révolver est armé.
La pièce l_ est l’âme du mécanisme, c’est elle en effet qui détermine tous les mouvements au moyen de la gachette m_ articulée en n_.
Au point 3 de la pièce l_ est articulé un cliquet o_, dont l’extrémité supérieure s’engage, par suite de la pression exercée par le ressort p_ dans le cran unique q_ pratiqué au chien.
La partie inférieure de ce cliquet se meut à partir du point d’articulation 3 dans une mortaise de section rectangulaire r_ pratiquée dans l’épaisseur de la pièce l_.
Dans cette mortaise se meut également la détente s_(?); c’est par son intermédiaire que le cliquet o_, oscille sur son axe et met ainsi le chien en liberté, dès que la pression de l’index se fait sentir sur son extrémité inférieure 4.
L’axe sur lequel pivote le cliquet o_, porte un autre cliquet non représenté au dessin, qui en engrenant constamment avec le rochet F du barillet détermine le mouvement de rotation de ce dernier, chaque fois que l’on fait tourner sur son axe 5, la pièce l_.
Cette pièce par suite de la pression exercée par l’index sur la gachette m_, peut prendre deux positions distinctes; au moyen du cran n_, au dessus duquel viennent successivement s’engager les deux encoches 1 et 2 du cliquet t_ (Fig.4.)
Le première encoche sert à empêcher le contact du chien sur les cartouches, afin d’éviter tout accident.
Le seconde encoche sert à retenir la pièce l_ au sommet de sa course, afin de fournir un point d’appui fixe au cliquet o_.
C’est par le mouvement combiné de ce cliquet, de la gachette et de la détente que le chien est au cran de sureté, armé ou dégagé.
Il est essentiel de remarquer que dans notre système toutes les cartouches s’introduisent simultanément contrairement à ce qui s’est fait jusqu’à ce jour.
Voici les dispositions que nous avons adoptées dans ce but.
Les cartouches sont, ainsi qu’on le voit Fig.4, à percussion centrale et fixées sur une couronne unique u_ au moyen du tube qui renferme la capsule dans chaque cartouche.
Ce tube se termine à l’intérieur par une calotte sphérique percée à son centre d’une petite ouverture; c’est par cette ouverture que la déflagration de la capsule produit l’inflammation de la poudre.
L’extrémité opposée de chaque tube est fortement sertie contre la paroi de l’ouverture correspondante pratiquée à la couronne.
Telle est la disposition, adoptée par nous, pour rendre les cartouches et la couronne solidaires.
L’ouverture centrale de la couronne est destinée à livrer passage au rochet, mais non à l’épaulement v_ qui forme partie intégrante du rochet, et au moyen duquel la couronne et par suite les débris des cartouches sont rejetés hors du barillet.
Maintenant que la destination de chaque pièce nous est connue, il nous reste à expliquer comment se manoeuvre notre arme.
Fonctionnement.
Pour opérer le plus commodément possible le chargement de notre révolver, on commence par redresser la gâchette, puis on appuie dessus afin d’amener le chien au cran de sureté. On place ensuite le révolver dans la main gauche de façon que le pouce s’appuie le long de la face supérieure du canon, en exerçant en même temps une pression avec les trois doigts du côté opposé et en avant de la gâchette, le barillet se trouve ainsi dans la paume de la main.
Cela fait, on saisit, entre le pouce et l’index de la main droite, l’extrémité supérieure du verrou G en lui imprimant un mouvement en avant; ce mouvement a pour résultat d’entrainer la tige D dans la même direction, par l’intermédiaire du levier H, rendu solidaire avec le verrou G. ((All reference letters were barred in this paragraph)). Dès que celui-ci est arrivé à la limite extrême de sa course la pièce A qui porte la tige D, servant d’axe au barillet étant par cela rendue libre, on fait décrire au verrou, de gauche à droite, un arc d’environ 90°; que décrit en même temps la pièce A, qui en est solidaire, en tournant autour de la charnière B. Le barillet se trouve alors placé dans la position indiquée Fig. 2. et 3. : c’est-à-dire que sa partie postérieure est complètement à découvert. Il est aisé de comprendre que l’introduction des cartouches peut à présent s’effectuer avec la plus grande facilité.
Si l’on veut extraire du barillet les débris des cartouches qu’il renferme, il suffit tout simplement de ramener le verrou G vers la crosse; la tige D, en suivant son mouvement rectiligne entraîne avec elle à l’aide de l’épaulement v_ la pièce à clavette F et celle-ci repousse à son tour les débris des cartouches hors du barillet.
Pour recharger l’arme on appuie avec le pouce de la main droite jusqu’à ce que la couronne qui réunit les cartouches ait pénétré entièrement dans la cavité pratiquée au barillet.
Pour ramener le barillet dans sa position primitive, il suffit de faire tourner la pièce A de droite à gauche autour de la charnière.
En tirant à soi l’extrémité du verrou G, celui-ci s’accroche à l’arrêt L; la tige D pénétrant en même temps dans l’ouverture K, se trouve ainsi parfaitement immobilisée dans sa position rectiligne. Il résulte en outre de ces dispositions que les ouvertures du barillet viennent se placer successivement et très exactement en face du canon.
Il nous reste à expliquer maintenant le mouvement de la batterie.
Lorsque les opérations du chargement sont terminées et que l’on veut se servir de l’arme, on la saisit de la main droite, comme à l’ordinaire, en plaçant l’index sur la gachette; notons en passant, que l’effort que l’on doit exercer sur celle-ci est naturellement en raison de la résistance que présente la force du grand ressort qui détermine la percussion : et c’est cet effort, relativement considérable qui fait dévier l’arme et rend ainsi la justesse du tir impossible.
La pression que l’on exerce sur la gachette fait tourner sur son axe la pièce l_. Arrivée à la limite de sa course, cette pièce se trouve immobilisée par l’engagement du cliquet t_ au dessous de l’encoche n_ qui y est pratiquée. Pendant ce mouvement la pièce l_ a entrainé dans sa course le cliquet o_ et celui non représenté au dessin; le premier a armé le chien, tandis que le second a imprimé un mouvement de rotation au barillet qui à chaque mouvement complet de la gachette vient successivement placer chaque cartouche en face du canon.
À ce moment la position respective des pièces dont se compose notre batterie est représentée Fig 4.
Nous ferons remarquer que la tension du grand ressort est produite par la position du chien qui est armé et celui-ci est maintenu dans cette position uniquement par le cliquet o_ dont l’axe 3, autour duquel il oscille est devenu un point fixe.
Il ne nous reste plus qu’à expliquer comment se produit le choc du chien qui détermine la déflagration de la capsule et par suite l’inflammation de la charge.
Nous avons dit que le chien était maintenu dans sa position armée par l’encoche dont il est muni et au dessous de laquelle s’engage le cliquet o_; il suffit donc pour opérer le dégagement du chien de faire osciller ce dernier sur son axe qui, libre dès lors, vient frapper instantanément sur l’amorce qui est placée à la partie centrale et postérieure de la cartouche, et le coup part.
Il est presque inutile d’ajouter que ce résultat s’obtient en pressant légèrement sur la détente (J?).
Nous ferons remarquer, en terminant, que vers la fin de sa course le talon x_ du chien vient frapper sur l’extrémité du cliquet t_ qui immobilise la pièce l_, celle-ci est dès lors mise en liberté et out le système reprend sa position primitive indiquée Fig.1.
Résumé.
Après avoir décrit la nature de notre invention et les meilleurs moyens à notre connaissance d’en réaliser l’exécution, nous désirons qu’il soit établi que nous revendiquons comme notre propriété privative, non seulement les résultats nouveaux qu’elle comporte, mais encore tous les procédés décrits, qu’ils soient employés ensemble ou séparément : ce que nous allons établir et justifier ainsi :
1° Mobilité d’un support, sur lequel repose l’axe du barillet, tournant autour d’une charnière : mobilité qui permet de mettre à découvert la partie postérieure de ce barillet, ainsi que l’indiquent, au reste les Fig. 2 et 3.
2° Réunion des cartouches à percussion centrale ou autres sur un seul et même disque : ce qui permet de les introduire simultanément dans le barillet.
3° Mouvement rectiligne de la tige sur laquelle tourne le barillet, qui permet de rejeter au dehors les débris des cartouches et le disque qui les réunis.
4° Extrême rapidité du tir résultant de la réunion des cartouches sur un même disque, ainsi que leur mode d’introduction et de rejet.
5° Procédés employés pour assurer la fermeture complète et le parallélisme de la tige sur laquelle tourne le barillet : cette tige devenant fixe au moyen du point d’appui qu’elle trouve à ses deux extrémités.
6° Disposition de la gachette mettant en jeu la batterie, et renfermant à sa partie supérieure une détente qui permet de décharger l’arme sans aucun effort : d’ou résulte la précision du tir.
7° Dispositions qui permettent d’armer et de désarmer sans contrarier les mouvements naturels de la main, et sans en changer jamais la position, de telle sorte que notre revolver comme arme de guerre éviterait la fatigue inhérente à l’emploi des armes actuellement en usage.
Il est inutile de dire en terminant que nous sommes loin de vouloir nous limiter aux dispositions et aux formes des organes que nous avons décrites. Nous nous réservons, au contraire, la faculté d’apporter à notre invention toutes les modifications que l’expérience pourrait nous suggérer et que nous pourrions juger nécessaires à son perfectionnement.
Il est aussi bien entendu, et nous entendons dire que les perfectionnements, les applications, les transformations ci-dessus énoncées peuvent être et sont applicables, ainsi que nous l’avons démontré, à toutes les armes telles que fusils, carabines et mousquetons.
Bruxelles, le vingt avril 1872.
V. Leniau J. Abadie