Patent: Lefaucheux

France 29055

(16987)

BREVET D’INVENTION DE QUINZE ANS,

En date du 5 septembre 1856,

Au sieur LEFAUCHEUX, à Paris,

Pour des perfectionnements apportés dans le mécanisme et la disposition générale des armes à feu.

Pl. XXXVIII.

Ces perfectionnements consistent,

1º En une disposition toute particulière d’armement et de percussion par la seule action de la pièce de détente;

2º En un moyen de retenir la charge dans les canons, quelle que soit la position que l’on fasse prendre à l’arme.

Ces deux dispositions sont principalement applicables aux pistolets ou carabines à rotation, à plusieurs coups et à un seul canon, bien que nous ne nous en réservions pas moins l’application à toute espèce d’armes à feu.

Nous allons commencer par décrire le mécanisme d’armement et de percussion pouvant agir indifférenment soit sur les cylindres mobiles ou révolvers de notre système, se chargeant par la culasse, avec des cartouches toutes faites, soit sur les cheminées des cylindres qui se chargent avec la poudre et les balles, à la manière ordinaire.

La figure i représente en section longitudinale un pistolet à six coups, muni des nouvelles dispositions dont nous désirons nous réserver la propriété.

La figure 2 est une vue par bout du côté de la culasse, en supposant le canon dévissé et le cylindrerévolver enlevé.

Les figures 3 et 4 indiquent en détail le cylindre que l’on charge à poudre et à balles, à la manière ordinaire; il est garni des cheminées sur lesquelles on place les capsules.

Les figures 5 et 6 indiquent le cylindre se chargeant par la culasse en ouvrant la petite porte h, fig. 2, dont celleci est munie.

Ce cylindre A’ remplace ou est remplacé à volonté par celui A, représenté sur les figures 1, 3 et 4.

La figure 7 fait voir le mécanisme à l’instant où l’échappement va se faire pour opérer la percussion.

Les figures 8 et 9 sont des détails de pièces importantes.

On peut se rendre compte, à l’aide des figures 1, 7,9, de la combinaison toute nouvelle du mécanisme de détente; on voit que la gâchette B est mobile sur un axe b, et qu’elle est rappelée dans la position indiquée fig. 1, c’est-à-dire quand l’arme est au repos, par un ressort méplat b’.

A cette même gâchette est articulé au point c un petit levier courbe C, auquel est relié un petit balancier D.

Ce balancier a son centre de mouvement & sur la partie prolongée et coudée, à l’intérieur de la crosse, du chien E.

Le chien est, en outre, muni d’une pièce f, articulée en e’, qui présente deux petites branches, fig. 8, dans lesquelles vient s’engager l’extrémité fourchue du grand ressort d’échappement F, fig. 9, de sorte que ce grand ressort tient tout le mécanisme soulevé tant que le crochet qui termine le petit ressort g est engagé dans l’entaille pratiquée à l’extrémité du balancier D.

Mais aussitôt que ce crochet abandonne l’entaille, ce ressort ramène avec énergie le chien sur la capsule, si c’est le cylindre à cheminée que porte le pis. tolet, et sur la broche, si c’est le cylindre à cartouche.

Nous allons expliquer comment cet effet sc produit sans autre armement qu’en agissant avec l’index sur la détente pour la ramener en arrière; par ce même mouvement, nonseulement on arme, mais encore on percute: en effet, en levant la détente, celle-ci tourne ou décrit un quart de cercle sur son centre b; le point c s’élève naturellement en soulevant par le levier C l’extrémité de gauche du petit balancier D, tandis que celle de droite s’abaisse, et, avec celle-ci, la partie coudée e’ du chien.

Ce mouvement force le chien à tourner sur son centre d et à s’élever jusqu’à ce qu’il soit arrivé dans la position indiquée fig. 7.

Alors, à ce moment, le crochet qui forme l’extrémité du ressort g’ vient rencontrer une petite saillie g’, laquelle le dégage de l’entaille pratiquée à la pièce D; celle-ci, n’étant plus retenue, laisse au grand ressort la faculté de se détendre, el, par suite, de faire tomber le chien avec la puissance nécessaire à la percussion.

On voit donc qu’au moyen de cette disposition mécanique assez simple, et par le seul fait du mouvement en arrière de la gâchette, nous obtenons l’armement et la percussion; mais il faut encore dans les armes à cylindre rotatif, comme celle que nous avons donnée pour exemple, faire tourner le cylindre à chaque armement, et le retenir d’une façon bien exacte et bien rigide en face du canon pendant la détonation; c’est ce que nous obtenons très-simplement à l’aide de l’équerre I, articulée avec la pièce C au point i.

La plus longue branche de cette équerre est contournée de façon à pouvoir s’engager alternativement dans l’une des six dents ou plans inclinés j, fig. 1, 3, 5 et 6, taillés dans l’épaisseur d’une bague ménagée au cylindrerévolver, de sorte qu’à chaque mouvement de la détente, quand le levier C monte, l’équerre I s’élève avec lui, et, par ce mouvement, fait tourner le cylindre d’un sixième de tour et l’arrête dans cette position conjointement avec la plus courte branche i’ de cette équerre, laquelle, arrivée à son maximum d’élévation, vient rencontrer une des six petites saillies j’, fig. 1, 5 et 6, ménagées sur la circonférence extérieure du cylindre-révolver; de cette manière, celuici est à la fois retenu dans un sens par la grande branche I, qui préalablement l’avait fait tourner, et dans le sens contraire par petite branche i’, rencontrant une des saillies j’.

La culasse K est percée d’une fente verticalė k, fig. 1 et 2, dans laquelle pénètre el se meut l’équerre I; cette disposition toute nouvelle est trèssimple et d’une construction facile et économique.

Nous pourrons ajouter au mécanisme d’armement et de détente que nous venons de décrire une disposition très-simple qui permettra de maintenir le chien armé. A cet effet, nous pratiquerons une entaille dans la pièce de détente B, et nous fixerons un ressort à l’intérieur du ponté B’; ce ressort pénètre dans l’entaille quand le chien est armé et le retient dans cette position. Mais quand on tire entièrement la détente pour percuter, le ressort est dégagé par une tige en communication avec le chien.

Pour placer le cylindre A’, fig. 5 et 6, qui se charge par la culasse avec des cartouches toutes faites, en remplacement de celui A, fig. 1, 3 et 4, qui se charge à poudre et à balles, à la manière ordinaire, il suffit, après avoir retiré la vis l, fig. 1, de dévisser le canon unique L d’avec la lige centrale m et de substituer le cylindre A’ à celui A.

Ce dernier peut être muni de cheminées p, placées verticalement comme celles représentées sur les figures 1 et 3, ou placées horizontalement, comme l’indique la figure 10.

Dans ce dernier cas, le cylindre ne change pas, et le chien E’ présente nécessairement une forme différente pour opérer la percussion.

Pour retenir la charge dans les six petits canons chargés à la manière ordinaire, et afin d’éviter le grave inconvénient qui se présente si souvent avec les pistolets actuellement en usage, celui de laisser tomber la charge quand on renverse l’arme dans une fonte par exemple, nous avons imaginé la disposition indiquée fig. 1, 3 et 4.

Elle consiste à percer un trou tangentiellement à chaque canon et à fileter ces trous, dans lesquels on engage les vis n; puis, quand les balles sont introduites dans le canon, à l’aide d’une clef N, fig. 1, que nous plaçons dans la crosse du pistolet, on fait faire un demi-tour à ces vis, et celte petite course est suffisante pour retenir les balles dans l’intérieur des canons.

Comme pour serrer les six vis les unes après les autres il faut un certain temps qui, quoique court, serait toujours jugé trop long, nous disposerons sur le cylindre une bague munie de petites fourches engagées dans les têtes des vis, de manière qu’en faisant tourner cette bague d’une très-petite quantité, on fasse fonctionner à la fois les six vis.

Nous nous proposons encore, pour arriver au même résultat, de fixer sur le côté du canon unique L une petite clef à charnière qu’il suffira d’abaisser audessus de chaque vis pour la serrer en la tournant d’une très-petite quantité, ou bien encore d’employer des ressorts, si le système de serrage des vis était jugé trop long.

Cette disposition pour retenir les balles avec leur chargement dans l’intérieur des canons aura, en outre, l’avantage, quand on voudra décharger l’arme, de n’entraîner aucun des embarras que présente le chargement à balle ordinaire; il suffira, en effet, de faire tourner les vis dans le sens opposé à celui du serrage pour dégager les balles et les faire tomber en frappant légèrement sur la crosse.

En résumé, nous entendons, par la présente demande de brevet d’invention, nous garantir la propriété,

1º Du système d’armement et de percussion obtenu par le seul mouvement de la gâchette;

2º De la disposition décrite et permettant de maintenir les projectiles avec sécurité dans l’intérieur du canon, quelle que soit la position de l’arme et les exercices que l’on fasse, soit à cheval, soit à pied.

Nous nous réservons l’application de ces deux points caractéristiques de notre demande et tous les changements dont ils sont susceptibles, pour les approprier à toute espèce d’arme à feu, pistolet ordinaire, révolver, carabine, fusil, etc.

3º Nous nous réservons aussi, comme en ayant eu l’initiative, l’idée de mettre sur le même révolver, soit un cylindre pour se servir de cartouche portant la charge complète, soit un cylindre ordinaire à cheminées.