Patent: Delvigne

France 21874

BREVET D’INVENTION DE QUINZE ANS,

En date du 22 novembre 1858,

Au sieur DELVIGNE, à Paris,

Pour un nouveau pistolet.

Les armes, en ce qui concerne leur maniement entre les mains de l’homme, ont dû naturellement être combinées d’après sa structure: ainsi, c’est la longueur du bras, convenablement ployé, qui a fait fixer de 35 à 38 centimètres la distance de la plaque de couche du fusil à sa détente.

Pour le pistolet, la distance de l’arrière de la crosse à la détente a été déterminée par celle qui existe entre la paume de la main embrassant la crosse du pistolet et l’index ployé, de manière à pouvoir agir sur la détente; ces règles sont fondamentales et invariables, sauf de légères modifications occasionnées par des différences dans la taille et la structure humaines.

En outre, dans presque tous les fusils ou pistolets en usage, la détente, par suite de la construction de la platine, se trouve placée de 2 à 4 centimètres en arrière de l’axe de la noix, laquelle se trouve ellemême de 2 à 3 centimètres en arrière du bouton de culasse du canon.

Les pistolets dits écossais et quelques révolvers dont la détente gâchette se trouve au-dessous de l’axe de la noix ou du chien font exception à cette règle, et il en résulte que de la paume de la main à la culasse du pistolet il y a une distance de 7 à 8 centimètres.

Le centre de gravité de l’arme est porté en avant et le bout du canon, qui n’est pas soutenu, tend à vaciller.

La précision du tir exigerait aussi que la détente fût ce qu’on appelle douce; mais les dangers que présente cette disposition pour les pistolets ordinaires ont dûy faire renoncer.

Ces remarques préliminaires sont importantes pour pouvoir plus facilement faire apprécier les avantages des combinaisons nouvelles.

La détente de mon pistolet, au lieu d’être placée en arrière ou au-dessous de l’axe de la noix ou du chien, et agissant autour d’un pivot, se compose d’une tige rigide complétement séparée de la platine et de l’écusson et enchâssée dans un canal adhérent au canon.

Ce canal ou appendice du canon porte aussi un crochet remplaçant le crochet de sous-garde; cette disposition offre ainsi une prise et un levier suffisants pour dévisser ou détourner le canon, sans avoir besoin d’une clef

La partie antérieure de la tige formant détente est terminée par un bouton qui se trouve placé à 6 ou 7 centimètres en avant de l’axe du chien et à 8 ou 9 centimètres en avant de l’arrière de la crosse.

L’extrémité opposée aboutit près de la queue de la gachette, confre laquelle elle est poussée par la pression du doigt sur le bouton; un ressort à boudin ou tout autre maintient la tige-détente dans sa position convenable vis-àvis de la queue de la gâchette et par sa réaction la repousse à sa place lorsque l’action du doigt l’a poussée en arrière.

Pour éviter les dangers d’une détente d’un départ facile, tout en conservant ses avantages, le bouton formant l’extrémité antérieure de la tige-détente est noyé dans l’ouverture évasée du canal, dans lequel il joue.

Par ce moyen, le doigt, avant d’agir sur la détente, rencontre le contour de l’ouverture évasée du canal, surtout du côté droit, et ce n’est que lorsqu’une pression assez forte du doigt a fait entrer sa chair dans cette ouverture, qu’un contact assez léger sur le bouton le repousse en arrière et fait partir le coup.

Ainsi ce pistolet, considérablement raccourci du côté de la crosse, se trouvant placé trèssolidement dans la main et maintenu par le crochet, ayant son centre de gravité fort en arrière, son point d’appui contre la paume de la main, peu au-dessous de la direction de l’axe du canon, la partie antérieure du canon appuyée sur l’index, enfin un départ trèsdoux de la détente, présente, par la réunion de ces moyens nouveaux avec l’application et la combinaison nouvelles de moyens connus, des résultats nouveaux et très-supérieurs à ceux que donnent les pistolets construits jusqu’à ce jour.