Patent: I. I. Abadie

Belgium 37573
Brevet de perfectionnement

Le ministre de l’intérieur,

Vu la loi du 24 mai 1854;
Vu le procès-verbal dressé le trois Avril 1875, à une heure cinquante cinq minutes,
au Greffe du Gouvernement provincial de Liège
et constatant le dépôt régulier fait par le Sieur I.I. Abadie, à Liège,
d’une demande de brevet de perfectionnement,
pour une modification apportée à la disposition et au fonctionnement des armes à feu, breveté en sa faveur le 26 Janvier 1874;

Arrête :
Article 1er,

Il est délivré au Sieur I.I. Abadie, à Liège,
un brevet de perfectionnement,
à prendre date le 3 Avril 1875 pour une modification apportée à la disposition et au fonctionnement des armes à feu.

Article 2eme,
Ce brevet lui est délivré sans examen préalable, à ses risques et périls, sans garanties soit de la réalité de la nouveauté ou du mérite de l’invention, soit de l’exactitude de la description et sans préjudice du droit des tiers.
Au présent arrêté demeurera joint le duplicata, certifié conforme par le Sieur Abadie de la description avec le dessin déposé à l’appui de la demande.

Bruxelles, le 16 Avril 1875,
Au nom du Ministre de l’Intérieur,
Le Secrétaire général

Demande d’un brevet de perfectionnement se rattachant au brevet d’invention, pris le 26 janvier 1874, pour perfectionnements apportés à la disposition et au fonctionnement des armes à feu, par Mr Abadie à Liège.

Exposé

Les perfectionnements qui font l’objet de ma demande ont pour but d’éviter les accidents malheureusement trop fréquents, qui résultent des dispositions défectueuses des revolvers existants.
Personne n’ignore que le moindre contact du chine avec la capsule peut parfois produire inopinément la déflagration de la charge, et causer ainsi des malheurs souvent irréparables. C’est pour les prévenir que l’on amène le chien un peu en arrière où il se trouve maintenu au moyen de la gâchette : on dit alors qu’il est au cran de sûreté, parce que, dans cette position, le chien cesse d’être en contact avec la capsule.
Par ce moyen, les accidents peuvent être rendus moins fréquents mais non évités ; car si le cran de sûreté n’est pas suffisamment profond, ou bien encore si la gâchette ou les pivots ne présentent pas toute la solidité voulue, un simple choc suffit alors pour abattre le chien et faire ainsi partir le coup, au moment où l’on s’y attend le moins.
C’est pour parer à ce danger que les fabricants d’armes recommandent expressément d’introduire la baguette dans un orifice quelconque du tonnerre : et cela avec raison, car ce dernier se trouve, dès lors, solidement enrayé et dans une position telle que si le chien venait à s’abattre, il ne pourrait frapper qu’entre deux cartouches, et, par conséquent, sans pouvoir, dans ce cas, déterminer la déflagration de la charge.
Mais le moyen d’obtenir ce résultat excellent présente d’un autre côté un inconvénient sérieux qu’il importe de signaler, le voici :
C’est qu’on ne saurait se servir de l’arme instantanément ; puisque chaque fois que l’on veut en faire usage, on doit au préalable retirer du tonnerre la baguette à l’aide de laquelle il est enrayé. Ce mouvement préalable, ennuyeux d’ailleurs, et qu’on oublie presque toujours d’effectuer, occasionne évidemment une perte de temps qui, lorsque l’on se trouve dans le cas de légitime défense, peut présenter un réel danger.
Frappé de ces inconvénients, que je tenais à faire disparaitre, j’ai conçu une disposition essentiellement nouvelle, facile à appliquer à tous les revolvers, et au moyen de laquelle l’arme est toujours prête à fonctionner, tout en rendant les accidents absolument impossibles, ainsi que je vais le démontrer, en me reportant aux dessins ci-joints.

Description

J’articule à la détente un cliquet, lequel porte à son extrémité une arête, destinée à pénétrer dans dans encoches pratiquées à la circonférence du tonnerre. Le pivot et le ressort fig.3 ont la même destination.
Cela posé, je vais décrire, en deux mots, le fonctionnement de ce mécanisme, réduit, ainsi qu’on le voit, à sa plus simple expression.
Si, après avoir chargé l’arme, comme à l’ordinaire, on imprime au tonnerre un faible mouvement de rotation partielle, l’arête du cliquet pénétrera instantanément, en vertu d’un ressort, dans la première des six encoches pratiquées à la circonférence du tonnerre. Celui-ci sera, dès lors solidement fixé dans la position qui rend tout accident absolument impossible.
Je dois faire remarquer que le tonnerre, ainsi immobilisé, ne peut quitter sa position, et par suite accomplir son mouvement rotatif, qu’en faisant mouvoir la détente ; soit en agissant directement sur elle, soit en armant le chien. Ajoutons enfin que, dans l’un et l’autre cas, la détente entrainera, dans son mouvement, le cliquet B, lequel, à son tour abandonnera le tonnerre qui, libre dès lors, pourra accomplir son mouvement de rotation.
Ces dispositions essentiellement nouvelles donnent évidemment une sécurité absolue et présentent, en outre le précieux avantage de pouvoir se servir de l’arme instantanément, et sans, qu’au préalable il soit besoin de désenrayer le tonnerre, puisque ce résultat se produit mécaniquement et sans qu’on s’en doute, par le simple jeu de la détente, qui d’ailleurs se meut comme à l’ordinaire.
Indépendamment des perfectionnements que je viens de décrire, les fig.1 et 2 montrent, avec une légère différence dans la construction, une disposition nouvelle de la partie antérieure de la sous-garde, et au moyen de laquelle la contre-platine ou cloison mobile, dont on voit en coupe le pivot F et le crochet G, peut être non seulement fixé au corps de l’arme, mais encore enlevée sous outils, avec une extrême facilité. Ce résultat est obtenu de la manière suivante :
A la partie antérieure de la sous-garde, logée dans l’intérieur de la carcasse et pouvant tourner autour de l’axe H, ou de la vis I, sont disposés, d’une part, une languette J, au dessus de laquelle vient s’engager le crochet G ; et d’autre part, un plan incliné L au moyen duquel le pivot M, formant partie intégrante de la cloison, est dégagé d’abord et ensuite repoussé.
Il résulte clairement, de ces dispositions, qu’en amenant la sous-garde dans sa position normale, représentée au dessin, après avoir au préalable mis en place la contre-platine, celle-ci sera solidement fixée au corps de l’arme ; tandis que la sous-garde, étant décrochée d’abord, et amenée ensuite dans la position tracée à l’encre rouge, produira l’effet contraire, c’est-à-dire le dégagement de la contre-platine, laquelle pourra, dès lors, s’enlever facilement, ainsi que la sous-garde elle même, si toutefois elle est construite d’après le dessin fig.1.

Résumé

Après avoir décrit la nature de mon invention et les meilleurs moyens, à ma connaissance, d’en réaliser l’exécution, je désire qu’il soit établi que je revendique comme ma propriété exclusive :
1° L’idée d’enrayer le tonnerre (sans le secours de la baguette) dans la position déjà décrite, qui rend absolument impossible la percussion inopinée du chien sur l’une ou l’autre des capsules.
2° Le moyen d’arriver au résultat qui précède par l’application, à la détente, d’une pièce mobile, laquelle vient pénétrer, sous l’action d’un ressort quelconque, dans l’une ou l’autre des encoches pratiquées ad hoc à la circonférence du tonnerre et l’immobiliser ainsi dans la position que je viens d’indiquer.
3° Les procédés et moyens à l’aide desquels le tonnerre est désenrayer mécaniquement sans qu’on s’en doute et à l’instant ou l’on veut faire usage de l’arme, et cela par le simple jeu de la détente, se mouvant d’ailleurs comme à l’ordinaire.
4° Les dispositions nouvelles qui permettent de fixer et d’enlever la contre-platine par un simple déplacement de la sous-garde.
5° Et enfin tous les moyens à l’aide desquels on pourrait obtenir les résultats sus-énoncés.

Fait à Liège le 30 Juillet 1875.
I. Abadie.